Murs De Commande

Les murs de commande sont en général mis en œuvre pour la réalisation de bâtiments qui sortent de l’ordinaire et dont les maîtres d’ouvrage disposent d’un budget important.

Les professionnels qui projettent les murs de commande et ceux qui les réalisent ont déjà acquis la réputation de réalisateurs d’ouvrages savants et au goût du jour.

Bien avant la vulgarisation de traités sur l’architecture, c’est par la réalisation de ces bâtiments exceptionnels que les nouvelles techniques et les innovations architecturales vont être connues et contribuer à l’évolution des architectures domestiques des villes et des villages.

Murs de commande appareillés

Ce sont des murs en maçonnerie complètement appareillée dans toute l’épaisseur du mur.

• Un mur d’appareil simple ne comprend dans son épaisseur qu’un seul rang d’éléments qui sont tous des carreaux ou des parpaings.

• Un mur d’appareil double comprend dans son épaisseur deux rangs d’éléments qui sont tous des carreaux ou des parpaings.

• Un mur d’appareil triple, quadruple comprend dans son épaisseur trois, quatre rangs d’éléments qui sont des carreaux, des boutisses et des parpaings.

murs de commande

Dans les murs de commande, les pierres d’appareil, au moins pour celles qui forment les parements, sont des pierres de taille dont les pans dressés et les arêtes vives donnent des joints rectilignes sur les faces vues du mur.

Les joints sont maigres (inférieurs à 1 cm) lorsque la pose est effectuée au mortier, l’appareil est dit à joints vifs lorsque la pose des pierres de taille est effectuée sans mortier.

La technique des murs de commande en pierre de taille appareillée est parfois utilisée pour réaliser une partie d’un mur dont le reste sera monté en maçonnerie traditionnelle ordinaire (pierres dégrossies, parements ébauchés et joints creux pour recevoir un enduit).

Dans les principales associations des deux types de maçonnerie, les utilisations des pierres d’appareil sont les suivantes:

• pierres d’appareil en assises formant par exemple les fondations et tout ou partie de la hauteur du rez-de-chaussée;

• pierres d’appareil en chaines :

– chaîne horizontale formée d’assises créant un chaînage (ex. : niveau d’appui des planchers et base d’établissement des encadrements des percements) ;

– chaîne verticale parfois harpée, dite chaîne d’angle à la rencontre de deux murs de façade formant un angle: toutes les deux pierres de la chaîne ont une longueur en parement égale, plus longue que celle des pierres intercalaires; toutes les deux pierres de la chaîne pénètrent de cette différence de longueur dans une ou plusieurs assises de la maçonnerie voisine avec laquelle la chaîne est alors solidaire;

– chaîne verticale parfois harpée, dite jambe formant une ossature verticale placée dans le cours d’un mur et appareillant parfois un mur de façade avec un mur de refend;

• pierres d’appareil, parfois harpées formant l’encadrement des percements (jambages et linteaux).

Dans certains cas (ex. : maçonneries de l’époque de la Renaissance), les pierres d’appareil forment une véritable ossature constituée par les assises, les chaînes, les jambes, les encadrements, dans la façade où les remplissages sont traités en maçonnerie courante traditionnelle à enduire. La solution fréquente du traitement des encadrements des percements en pierre de taille dans une maçonnerie traditionnelle avec appareil double, fréquemment mimée par la moulure d’encadrement des baies simplement exécutée au mortier de chaux, dérive directement de l’exemple des maçonneries de commande appareillées.

Murs fourrés

Les murs fourrés témoignent de la forte division du travail entre des professionnels expérimentés et de nombreux manœuvres : professionnalisme des tailleurs de pierres et des maçons qui montent les parements entre lesquels les aides, autrefois recrutés dans le cadre institutionnel de la corvée (travail gratuit dû à l’autorité par l’assujetti), entassent les cailloux jetés pêle-rnêle dans le mortier de chaux et qui constituent la fourrure.

La fourrure est exécutée par couches successives dont l’épaisseur correspond fréquemment à la hauteur des pierres de parement.

MUR DE COMMANDE FOURRÉ

MUR DE COMMANDE FOURRÉ

Ces murs fourrés correspondent à une technique fort ancienne, probablement expérimentée pour la première fois par les Romains durant la première moitié du Ille siècle avant notre ère (repère archéologique des murailles de la cité de Cosa, en Italie du Sud, édifiées en 273 av. ].C.), et parfois connue sous le nom de « béton romain» : l’essence même de la structure est formée par la fourrure, le noyau du mur, qui résulte du mélange de pierres et de mortier de chaux; les parements qui donnent son aspect à l’ouvrage terminé jouent le rôle du coffrage. Les murs fourrés sont fréquemment associés à des voûtements eux-mêmes réalisés en béton de pierre et de chaux, coulé sur un parement appareillé ou même sur un simple coffrage. Rapidement vulgarisée, cette technique a été largement utilisée dans les constructions modestes jusqu’au milieu du XIXe siècle, et nombreux sont les voûtements, en particulier de caves, sur lesquels les empreintes du couchis sont encore complètement visibles (cf. ci-après, chapitre Les voûtements).

Le béton de la fourrure donne au mur une structure massive et monolithique. Ce type de mur est fréquemment utilisé pour les ouvrages de l’époque médiévale. Il a été utilisé jusqu’à une époque récente (ex. : les bâtiments du XVIIIe siècle à l’abbaye de Montmajour à Arles).

Dans la réalisation du mur fourré, la part de travail des tailleurs de pierre et des maçons est diminuée par l’importance du travail exécuté par

la main-d’œuvre assujettie à la corvée ou par une main-d’œuvre non qualifiée.

Pour une épaisseur de maçonnerie comparable, la construction du mur fourré est plus rapide que celle du mur de commande avec appareils multiples.

Enfin, le mur fourré permet d’utiliser largement les cailloux du voisinage, tandis que la construction du mur de commande avec appareils multiples implique un approvisionnement régulier en pierres de carrière.