Murs porteurs de la maison

Murs porteurs de la maison :

Murs publics des façades, murs cachés des refends, murs mitoyens des propriétés, ils sont traditionnellement désignés comme les murs maîtres.

Les percements des murs des façades ouvrent les volumes habitables des maisons sur les espaces publics urbains et sur les cours et jardins privés. Les murs de refend, qui sont aussi fréquemment mitoyens, portent les voûtes et les planchers.

Bien que confortée par la fréquence des observations, cette théorie de la division du travail entre les murs ne rend pas tout à fait compte de la réalité qui est un peu plus confuse, certaines façades portent les planchers et certains refends ne les portent pas; d’anciens refends ont été mis en situation de façade à la suite de curetages plus ou moins anciens; d’anciennes façades sont devenues des refends lorsque la construction a été agrandie sur une cour ou un jardin; une des deux façades d’angle est nécessairement porteuse, etc.

Il importe de prendre en compte l’évolution morphologique des bâtiments, qui peut quelquefois contredire les théories reconnues de la division du travail entre les murs.

LE CAS PARTICULIER DES MURS DE FAÇADE

Ces distinctions fondées sur la position des murs, façade, refend, ou sur le rôle qu’ils jouent dans la défmition des limites de propriété (mitoyen) signifient aussi des différences dans les modes de percement : nombreuses portes et fenêtres des façades, quelques portes relativement rares mais généralement superposées dans les refends et aucun. percement dans les mitoyens.

A surcharge égale et fondations équivalentes, ce sont les murs qui comportent le plus de percements qui sont les plus vulnérables. Ainsi, on observe que les murs des façades sont ceux où les désordres sont fréquemment les plus importants; toutefois, les percements ne font qu’affaiblir les murs des façades qui sont soumis par ailleurs à des épreuves que ne connaissent pas les autres murs :

_ Les murs des façades sont exposés aux intempéries.

_ Lorsqu’ils sont porteurs, ils peuvent recevoir des poussées accidentelles, parfois ponctuelles, exercées par exemple par un plancher déformé.

_ Ce sont enfin les fondations des murs de façades qui sont les plus ébranlées par la circulation urbaine, parfois même déséquilibrées par les tranchées ouvertes dans les rues et parfois inondées (tassement probable) par les fuites des réseaux publics d’eau et d’assainissement.

Dans certains quartiers, lorsque la pente des rues fait que certaines caves sont semi-enterrées ou bien lorsque les maisons sont construites sans caves, les niveaux du fonds des tranchées des réseaux publics sont souvent inférieurs aux niveaux des fondations; dans certaines rues étroites, les tranchées sont ouvertes à proximité immédiate des façades dont les fondations sont presque déchaussées. Même lorsque les caves sont normalement enterrées, l’ouverture d’une tranchée contre la façade recevant la poussée d’un voûtement formant le plancher du rezchaussée,. peut provoquer une déformation du mur qui a perdu sa butée et une fissuration dans

le voûtement. Le problème des relations de voisinage entre les voiries et réseaux publics modernes et les constructions traditionnelles est d’autant plus important qu’il est négligé.

L’examen de l’état de la façade, lieu de désordres les plus importants, permet de faire un pronostic quant à l’état des autre murs, qui ont routes les chances d’être meilleurs.

LES MURS porteurs, OSSATURE PORTEUSE DE LA MAISON

Montés en général en maçonnerie dont les comportements sont à peu près identiques quelle que soit leur composition (sauf lorsqu’il s’agit de maçonneries totalement hétérogènes : murs de commande et murs ordinaires), fondés au même niveau et de la même manière lorsque le sol est horizontal, les murs sont aussi plus ou moins solidaires les uns des autres au niveau de leurs intersections qui sont parfois mais pas toujours appareillées en profondeur. La solidarité structurelle des murs d’une maison, des murs d’un îlot villageois ou urbain, est renforcée par les planchers, en particulier par leurs poutres porteuses, qui forment un chaînage. Les poutres qui forment chaînage aussi longtemps qu’un désordre grave ne les a pas désolidarisées des murs, peuvent également, lorsque les flèches qu’elles ont subies sont importantes, agir sur les murs à la manière d’un arc et créer une poussée horizontale contre le mur.

Intersection entre les murs porteurs

On peut, en quelque sorte, comparer l’organisation structurelle des murs d’un ensemble construit à celle d’un très grand caillebotis dans lequel chaque intersection est un ouvrage particulier, soit que les murs soient appareillés entre eux, soit que l’un soit simplement interrompu contre l’autre.

UN TRÈS GRAND CAILLEBOTIS

GRAND CAILLEBOTIS

Les chaînes d’angle appareillent la rencontre entre deux murs qui forment l’angle d’une construction longue. La chaîne d’angle est exprimée comme un élément d’architecture suivant l’appareil utilisé, elle est dite en bossage ou harpe; (lorsque la chaîne exprimée fait saillie par rapport aux nus des deux murs, elle est dite en bossage). Dans les constructions traditionnelles simples, l’appareil d’angle n’est en général pas visible, recouvert par les enduits, et ce sont chacun des deux parements formant les murs doubles ou les murs simples qui sont harpés les uns dans les autres.

CHAÎNE HORIZONTALE CHAÎNE D’ANGLE ET ENCADREMENT HARPÉ

CHAÎNE HORIZONTALE CHAÎNE D'ANGLE

La jambe est une chaîne verticale placée dans le cours d’un mur et qui assure son appareillage avec un autre mur qui lui est perpendiculaire. Comme la chaîne d’angle, la jambe peut être en harpe, en besace ou en bossage. Comme la chaîne d’angle, la jambe est en général invisible sous l’enduit des constructions traditionnelles simples et l’appareillage commun des murs est limité à quelques harpes donnant une liaison relativement incertaine. Les fissures sont très fréquentes entre les têtes des murs de refend et les façades. En général, les fissures commencent en bas des murs et s’élargissent en montant, ce qui peut exprimer l’un ou l’autre, ou les désordres suivants: peut-être poussée en tête par une charpente défectueuse, la façade est légèrement déversée vers l’extérieur; le mur de refend est déformé en flèche à la suite d’un tassement de sa fondation. (cf. chapitres Charpentes et Fondations).

JAMBE APPAREILLANT UN MUR DE FAÇADE

JAMBE APPAREILLANT UN MUR DE FAÇADE

La jambe peut être aussi utilisée pour appareiller la rencontre de quatre murs ou de deux murs qui se croisent, l’un des deux étant continu et comportant des harpes solidaires de l’appareil des deux autres. Dans la réalité, on observe assez fréquemment des harpages insuffisants, voire inexistants.

L’organisation structurelle des murs évoque un gr « caillebotis» dans lequel chaque intersection joue un et peut être renforcée par un ouvrage particulier.

Les renforts du mur

Le mur est renforcé dans son cours par les autres murs qu’il rencontre au niveau des jambes et des chaînes d’angle. Il peut l’être également par des jambes isolées. Il peut l’être aussi du fait du choix d’une épaisseur plus importante dans les niveaux inférieurs (murs d’épaisseur décrois- . sante soit avec ressauts à chaque étape, soit avec fruit sur le parement extérieur). Il peut l’être enfin par des contreforts.

Les contreforts sont rarement d’origine dans les ouvrages de maçonnerie traditionnelle simple. En revanche, on en observe qui ont été rapportés soit pour pallier un désordre réel, soit pour prévenir un désordre attendu (cf. les contreforts «souvenirs» de murs antérieurs après les démolitions effectuées dans certains îlots de bâtiments déclarés en péril), soit pour protéger l’angle de deux rues (il s’agit davantage d’un appareil de revêtement à un seul parement parementé dit fruit, dont l’angle est parfois protégé par une borne chasse-roue et blindé par des fers plats assez importants).

Les faiblesses du mur

– Certains murs présentent des faiblesses qui résultent de causes accidentelles comme les tremblements de terre, les incendies qui diminuent considérablement la résistance de certaines pierres et les rendent friables, les tassements des sols de fondation inondés par les fuites des réseaux, les fondations déchaussées par les tranchées urbaines, etc.

_ Au-delà des causes accidentelles, certains

murs peuvent avoir des faiblesses qui ont pour cause, soit des malfaçons d’origine ou datant de modifications postérieures maladroites (ce n’est pas aussi rare qu’on le pense), soit des erreurs de conception à l’origine.

Les défauts les plus courants affaiblissent le mur suivant des lignes verticales qui le sectionnent dans son cours :

• Les coups de sabre correspondent à un montage défectueux de la maçonnerie dans laquelle les joints verticaux ne sont pas croisés mais superposés en alignement vertical.

• Les juxtapositions de maçonneries d’époques différentes ne sont pas toujours harpées l’une dans l’autre.

• Des saignées verticales affaiblissent les murs; ainsi, dans des maçonneries à deux parements, afin de diminuer ou supprimer la saillie intérieure des conduits de fumée dans les pièces, un des deux parements est supprimé et le conduit entaille profondément le mur; l’effet conjugué de la chaleur des foyers et des brais de combustion qui imprègnent les pierres (en fonction inverse de leur dureté), et les mortiers de chaux du parement et de l’enduit extérieur peut dissocier le mur d’autant plus gravement qu’il risque en plus de se fissurer suivant la ligne de faiblesse que constitue le conduit; les dégats peuvent alors être aggravés par les eaux de pluie. U ne disposition aggravante a été observée à diverses reprises: le conduit était traversé par une poutre du plancher qui allait chercher son appui sous le parement extérieur du mur. Curieusement, la poutre traversante n’était brûlée que dans un seul cas et ne reposait alors que sur le simple manteau intérieur du conduit : ceci ne fut découvert qu’au sondage; aucun désordre n’était visible de l’extérieur.

Des causes accidentelles, des malfaçons d’origine, des modifications maladroites affaiblissent le mur suivant des lignes verticales qui le sectionnent dans son cours.

_ Cités pour mémoire et tout à fait inévitables, les percements constituent évidemment des faiblesses qui sont bien exprimées par les nombreuses fissurations et déformations observées dans les portes et fenêtres. Toutefois, la plupart de ces déformations traduisent des tassements différentiels des fondations. On observe toutefois, que ces déformations qui ne sont pas toujours graves s’accompagnent parfois de « bouffements» du mur double dont les deux parements se dissocient l’un de l’autre.

Le bouffement exprime bien une faiblesse du mur traditionnel qui, rappelons-le, ne comporte pratiquement jamais de boutisse et dont le coeur est fréquemment hourdé en « mortier d’agasse», Cette faiblesse traditionnelle des murs à double appareil qui sont montés sans boutisse et parfois avec un peu trop de mortier d’agasse, doit être tempérée par l’observation de leur âge: ils ne sont pas aussi faibles qu’ils le paraissent et leur friabilité (on les démonte à la main), en opposition avec la dureté et la rigidité des matériaux modernes, n’est pas toujours synonyme de fragilité.

Les percements peuvent contribuer à amplifier des déformations: ces déformations des percements donnent ainsi à lire les désordres en fondations.